J'ai créé ce blog lors de la sortie de mon livre "Les Indispensables mathématiques
et physiques pour tous", Odile Jacob, avril 2006 ; livre republié en poche en octobre 2011 (achat en ligne) (sommaire du livre).
Je développe dans ce blog des notions de mathématiques et de physique à destination du plus large public possible, en essayant de susciter questions et discussion:n'hésitez pas à laisser vos commentaires!
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Indispensables astronomiques
Nouveauté octobre 2013, mon livre "Les Indispensables astronomiques et astrophysiques pour tous" est sorti en poche, 9,5€ (éditions Odile Jacob, éidtion originale 2009).Comme mon premier livre (Les Indispensables mathématiques et physiques), c'est un livre de notions de base
illustrées avec des exemples concrets, s'appuyant sur les mathématiques (géométrie notamment) pour l'astronomie, et sur la
physique pour l'astrophysique. Je recommande vivement sa lecture.
(commentaire d'une vidéo cultureGnum, octobre 2022)
La carbochimie (obtention des produits chimiques actuels à partir du bois) est à présent caduque depuis l’arrivée de la pétrochimie (obtention de ces produits comme sous-produits du raffinage du pétrole ou, dans ce cas, du gaz naturel).
Cependant « la pyrolyse du bois [carbochimie] était une industrie importante avant l'avènement des combustibles fossiles à bon marché tels que la houille, le pétrole et le gaz naturel, elle constitue la phase initiale de la chimie du bois. » (Wikipédia)
Qu’est donc ce processus industriel ? Plusieurs entreprises du Morvan (SPCC à Clamecy, Lambiotte à Premery,... ; à l’époque des années 1940, les deux établissements les plus importants d’Europe !) ont fabriqué de 1900 à 1970 environ des produits chimiques à partir des feuillus des forêts du Morvan.
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Le bois est … un produit chimique (organique), principalement fait de cellulose (ci-dessous formule développée de la cellulose, WikiCommons auteur Neurotiker)
En combustion aérobique (à l’air, avec oxygène), le bois se consume. La carbochimie et fondée sur la combustion anaérobique du bois (ou pyrolyse, ou combustion lente dans des fours fermés). Pour 100 kg de bois, cette combustion conduit, avec un bon rendement énergétique, à :
25 kg de charbon de bois.
1 kg de méthanol, CH3OH, ou alcool méthylique, ou « esprit de bois », ou « alcool de bois »
1 kg d’acide acétique, CH3-CO-OH, ou « vinaigre de bois »
4 kg de goudrons
46 kg d’eau
23 kg de gaz (chaud, qui est recyclé pour entretenir la pyrolyse)
(total = 100 kg)
Le charbon de bois (appelé ainsi par opposition au « charbon de terre », lignite ou anthracite) est du bois débarrassé de ses impuretés chimiques (jus pyroligneux), utilisé notamment pour les besoins en chauffage (condensé, donc plus léger et maniable que le bois).
Aujourd’hui, le méthanol est produit à partir du méthane (gaz naturel) CH4, par une suite de réactions (dites de vaporeformage du méthane), passant par l’obtention du CO (non présent dans la nature), et en dernier ressort, avec un catalyseur adéquat, la réaction : CO + 2 H2 → CH3OH. La société Air Liquide est leader mondial de ce type de procédés. « Le méthanol est utilisé comme solvant dans les vernis-laques, peintures, ciments, encres, antigel, colorants, plastiques et diverses peintures industrielles. C'est aussi un carburant pour les fusées.» (Wikipédia).
Aujourd’hui, l’acide acétique est principalement fabriqué par carbonylation du méthanol (dont la dernière réaction, avec catalyseur adéquat, est CH3OH + CO → CH3COOH). Il est utilisé dans de nombreux domaines et fonctions : solvants, alimentation, textile, composant du PET, lubrifiants, papeterie, …
(sur 100 l. de jus pyroligneux : 7l de méthylène ou alcool méthylique et 12l d’acide acétique – extrait vidéo cultureGnum)
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La chimie du bois, éteinte depuis les années 1970, serait-elle un sujet intéressant à nouveau ?
Au colloque de la Forge royale de Guérigny (oct. 2022), un conseiller régional de Bourgogne (EELV), salarié de l'ONF, se demandait, peut-être un peu naïvement : pourquoi a-t-on fermé ces usines dans les années 1970, alors que de nos jours la chimie du bois paraît avoir un bien meilleur bilan carbone ?
Et un ingénieur industriel dans la sidérurgie, croisé récemment, travaille actuellement sur la possibilité d'utiliser en grandes quantités dans ses usines du coke à partir du charbon de bois (tel qu'ici décrit), en remplacement du charbon devenu traditionnel (charbon de terre, ou lignite, anthracite) ?
Le terme science recouvre un certain nombre d’aspects. C’est un ensemble de connaissances, en évolution constante. Un métier, pour certains. Une approche et un raisonnement : la méthode scientifique. Qu’est-ce que la méthode scientifique ? Grande et belle question. L’histoire des sciences, et l’épistémologie (étude de la construction des savoirs scientifiques) permettent en partie d’y répondre, en tout cas d’illustrer cette méthode. Je voudrais égrener ici, sous forme de points successifs, un certain nombre de réflexions que je me suis faites, au cours d’une carrière de vulgarisateur et d’historien des sciences ; elles me paraissent intéressantes pour un lycéen de Première dans le cadre de l’évolution de l’enseignement scientifique général.
Primo.Qu’est-ce qui importe le plus dans la science, la théorie ou les faits ? Les deux ! Dans l’histoire, et même de nos jours, certains savants plus « expérimentaux » privilégieront toujours les faits, c'est-à-dire les résultats d’expérience. Ils ont raison… mais les « théoriciens » aussi ! Car si une théorie sans faits expérimentaux ne vaut rien, des faits sans théorie non plus : un scientifique a besoin d’un cadre théorique pour interpréter ses résultats expérimentaux – ce qui a fait faire au physicien Ludwig Boltzmann ce jeu de mots : « Rien n’est plus pratique que la théorie. » Tel « fait » ne signifie pas la même chose dans un cadre théorique donné ou dans un autre, et c’est justement ce qui peut éventuellement permettre d’écarter une théorie au profit d’une autre.
Secundo. Le rapport entre la science et la technique. On croit trop souvent que la science précède la technique, celle-ci étant une « application » de celle-là. Mais ce n’est pas si simple ! La technique a parfois précédé la science, le savoir-faire a précédé le savoir. On a fait fonctionner une machine à vapeur de Watt (à partir de 1775) avant de comprendre le processus de conversion de la chaleur en travail (avec le Français Sadi Carnot, cinquante ans plus tard, en 1825). Encore de nos jours, comme avec le télescope de Galilée lui permettant d’énoncer certains de ses résultats, la technique permet des appareils de mesure toujours plus précis, des grands équipements de recherche plus performants (comme le collisionneur du CERN à Genève pour la physique des particules), qui à leur tour permettent de faire avancer les connaissances scientifiques. On pourrait multiplier les exemples, et en donner d’autres en mathématiques : certains résultats, comme le « théorème des quatre couleurs », ne peuvent être démontrés que grâce à la puissance acquise en calcul informatique….
Tertio. Une chose fascinante dans la science – dans la théorie, et chez certains savants – est son caractère prédictif. Prenons l’exemple d’Einstein (mais on pourrait en prendre d’autres) : la relativité générale est en sommeil entre 1925 et 1960 – personne ne s’y intéresse, et ce jusqu’au début de la conquête de l’espace, qui amène des satellites rapides, des télescopes spatiaux permettant à partir des années 1960 et toujours maintenant de vérifier la relativité générale, théorie émise fin 1915. Au point que celle-ci en vient à être qualifiée de « boîte à outils de l’astrophysique ». Le système GPS, opérationnel depuis les années 2000, confirme en même temps qu’utilise et la relativité restreinte (1905) et la relativité générale (1915). Il en va de même de l’idée d’« émission stimulée » (émission d’un photon par un électron qui se désexcite), hypothèse émise par Einstein dans le cadre de la physique quantique en 1917, et qui trouvera à la fois sa confirmation et son application dans le laser optique dans les années 1950 (laser signifie d’ailleurs : light amplification by stimulated emission of radiation – on retrouve la notion d’ « émission stimulée »).
Quarto. La science, c’est aussi une épopée, non pas de controverses, mais de discussions constructives entre pairs – tout résultat doit pouvoir être reproduit, donc confirmé, sinon contesté – avec des arguments bien sûr. Ainsi la science est-elle à la fois un savoir cumulatif (les résultats s’accumulent), mais aussi un avoir substitutif (une théorie peut chasser l’autre, car elle interprète mieux ou en plus grand nombre les faits) ; seules les mathématiques ne sont que cumulatives – les sciences de la nature à proprement parler sont, en plus, substitutives (en physique, la théorie de la relativité générale d’Einstein a chassé la gravitation de Newton ; la théorie darwinienne de l’évolution a chassé la vieille théorie fixiste d’un univers créé une fois pour toutes par une puissance extérieure). Un des plus beaux exemples de cette construction des savoirs est la théorie de l’atomisme (la réalité de l’existence des atomes), jusqu’au début du xxe siècle où l’existence des atomes est attestée. On l’a oublié, mais avant cela la plupart des grands savants pensait, assez naturellement puisque c’est ce qu’on observe à l’échelle macroscopique, que la matière était continue, et non pas constituée d’éléments insécables, dits atomes (du grec a-tomos, qui ne peut être coupé). Ou plutôt la question… ne se posait pas, parce qu’elle n’était pas vraiment nécessaire à ce moment-là du développement de la science. Ainsi Gay-Lussac employait-il molécule (petit élément de matière) pour ce qu’on appellera plus tard atome, ce qui ne facilite pas la compréhension pour le lecteur contemporain (pour lequel molécule signifie assemblage d’atomes) ! À la même époque, on connaissait bien sûr l’acide chlorhydrique HCl (qu’on appelait acide muriatique), mais on ne connaissait pas l’élément chlore Cl : on l’appelait acide muriatique oxygéné (c'est-à-dire l’HCl où l’hydrogène est réduit par l’oxygène, ce qui donne donc du chlore, et de l’eau), avant de réaliser que c’était… un corps simple, le chlore ! Ce que l’on serait tenté de voir de nos jours comme des erreurs constitue en fait la construction féconde des savoirs scientifiques.
Cependant. Ce n’est sans doute pas le lieu dans ce manuel de parler d’enseignement de la science – encore moins de le critiquer ! Mais, malgré tout ce qui précède, malgré tous les exemples que j’ai pris dans l’histoire des sciences (si je les ai pris dans l’histoire, c’est parce qu’ils permettent plus facilement que des exemples contemporains de comprendre ce qu’est effectivement la science…), je mets en garde : l’histoire des sciences, certes fort nécessaire et à présent bienvenue dans l’enseignement, ne saurait se substituer à la science elle-même et à l’énoncé de ses résultats. La science est une belle histoire, mais chacun, à son niveau – à commencer par celui du collégien puis du lycéen – doit avoir à comprendre intimement et à intégrer un certain nombre d’« acquis ». Le récit, utile, ne saurait remplacer l’assimilation des résultats effectifs…
Finalement.Qu’est-ce qu’une « culture scientifique » ? C’est, à n’en pas douter, la nécessité de conserver après le lycée une curiosité pour les résultats scientifiques les plus récents, en mathématiques, en physique, en biologie ; c’est avoir la possibilité de les comprendre, dans leurs grandes lignes. Mais y a-t-il vraiment à distinguer une culture qui serait générale et une culture qui serait, elle, scientifique ? Certes, la spécialisation de la science, l’augmentation de la sphère de la connaissance, font qu’il est difficile – il faut s’accrocher ! – de maintenir pour soi-même une « culture scientifique » tout au long de sa vie. Mais on ne saurait distinguer l’une de l’autre : la culture scientifique fait nécessairement partie de la culture générale – la culture scientifique est une culture générale. Je dirais même plus, en inversant la proposition : toute culture générale est – ou devrait être – scientifique : j’entends par là que, même dans le domaine de l’actualité, de l’opinion, une démarche scientifique est utile, voire nécessaire. Face au déferlement quotidien d’informations et d’opinions sur les sujets les plus divers, un minimum de raisonnement, d’approche scientifique est ô combien nécessaire, certes pour les annonces scientifiques, mais aussi pour les faits d’actualité plus générale, qui sont plus nombreux, et plus controversés ! Savoir évaluer la probabilité de véracité d’une information, la pertinence de son émetteur, etc., nécessite une forme d’approche scientifique – pour laquelle la formation par la science, ou la compréhension de la démarche scientifique, sont fort utiles ! Bref, si l’on entend parfois que « la science est partout », c’est sans doute vrai – mais ce pourrait l’être encore plus : qui que nous soyons, quelles que soient nos préférences dans les savoirs, nous avons besoin de la méthode et du raisonnement scientifiques dans notre appréciation du monde dans lequel nous vivons.
Lecture et analyse des articles d’Idriss Aberkane sur la conjecture de Syracuse
Nous voulions analyser l’article de 2017 d’Idriss Aberkane sur la conjecture de Collatz-Syracuse[1]. L’un de nous, JJLP (Jojo Le Poisson)[2], par ailleurs mathématicien, « s’y est collé » : il a produit le document joint en annexe, qui résume en 2 pages et commente en une troisième l’article de 15 pages d’IA. L’idée était de comprendre ses éventuels résultats, et de les exposer de manière accessible, par « réduction[3] » et simplification de cet article ; en effet celui-ci est peu lisible, mal écrit (au sens de : manque de clarté, manque d’exposé des objectifs) – par ailleurs de nombreuses notations souvent superflues en rendent la lecture difficile[4]. Ce travail était d’autant plus nécessaire que dans certains de ses tweets[5] (comme ici), IA en donne un résumé qui ne correspond pas aux résultats de son propre article.
Sur le fond, nous pouvons résumer cet article IA 2017 ainsi : « Démontrer la GGC (Golden Gate Conjecture)[6] équivaut à démontrer celle de Syracuse » ; sachant que la GGC s’énonce ainsi : « Pour tout entier naturel N congru à 5 modulo 8, les orbites de N et de (2N + 1) convergent. » C’est ce que l’on appelle un résultat d’équivalence. Mais rien n’indique que cette équivalence corresponde à une avancée dans ou vers la démonstration : il est même très probable que ce ne soit pas le cas. L’histoire des mathématiques est pavée de conjectures censées en simplifier une autre, y compris quand celle-ci s’est avérée fausse[7]. Dans le problème de Syracuse, il existe aussi d’autres énoncés d’équivalence, en apparence plus puissants que celui d’IA – mais dont rien n’indique là aussi qu’ils permettent d’avancer dans la démonstration[8]. Autrement dit, l’article IA 2017 est vrai, une partie en est non triviale (il n’est pas immédiat de le comprendre)[9], mais est-il original (au sens : apporte-t-il réellement quelque chose) ? L’analyse de la dernière partie de IA 2017, la GGC Golden Gate Conjecture (sa proposition 10), peut être facilement déduite d'un article Cadogan [2000] : ceci réduit de beaucoup l’intérêt d’IA 2017 (nous en discutons ci-après). Nous serons plus catégoriques sur le fait que, contrairement à ce que prétend IA sans précisions, son article puisse apporter des éléments de théorie à la résolution de Syracuse : tel n’est pas le cas.
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Il est à noter que, fort de cette première analyse, JJLP a aussi tenté de faire le même travail pour l’article suivant d’Aberkane [2020a][10], de 15 pages, mis en ligne en français à peine une semaine après qu’eut éclaté la franche discussion sur Twitter – ce qui suppose qu’IA « l’avait sous le coude » et ne le publiait pas, pour des raisons qui lui appartiennent. A l’inverse de l’article de 2017, la compréhension de cet article de mi-janvier 2020 et sa réduction n’ont pas été possibles, compte tenu de sa rédaction et de son caractère confus et incompréhensible dès l’abord[11] : nous affirmons cela d’autant plus aisément que ce travail avait pu être fait pour le premier article, ce qui prouve si besoin en était le caractère volontaire et sans préjugés de notre démarche.
Enfin, le 28 janvier 2020, alors que nous rédigions le présent document, IA a mis en ligne, cette fois-ci non sur HAL mais sur son blog, un 3e article [2020b] : « At least almost all Collatz orbits attain bounded values, and other significant corollaries on the Syracuse problem ». Le rythme, comme en réponse au fait qu’IA ait été poussé dans ses retranchements sur Twitter, est difficile à suivre ; et peu cohérent avec une élaboration scientifique patiente de résultats successifs. Sur la forme, la rupture de style entre le papier en français de mi-janvier (IA [2020a]) et celui en anglais de fin janvier (IA [2020b]) est saisissante : on est revenu d’un article non mathématique à un article mathématique, mal écrit (analogue à IA 2017). Sur le fond, [2020b] est composé de deux parties : la première reprend les idées de la première partie de IA 2017 en les exposant de façon plus concise, quoiqu’encore avec un luxe de notations la rendant assez difficile d'accès. La deuxième décrit un « algorithme » nouveau, le Golden Gate Automaton (lié au principal « résultat » d’IA 2017, la GGC) : mais tant la description de l'algorithme que les démonstrations des deux « théorèmes » qui en décrivent les vertus sont absolument opaques – il n’a pas été possible de les décoder. L'absence de définition de « almost all » laisse perplexe – tout particulièrement quand IA compare ses résultats à ceux de Terence Tao [2019][12] qui, lui, définit précisément ce qu'il entend par « almost all », puis produit une preuve subtile de 49 pages en faisant usage d'outils d'analyse et de probabilités.
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Nous revenons à présent sur le premier article IA [2017], non son contenu (déjà évoqué ci-dessus, et résumé en annexe ci-après), mais sur ses conditions de production ; travailler sur un article (ici, IA 2017) amène de facto, et de manière la plus neutre possible, à s’intéresser à son contexte de production. Par ailleurs, la recherche du caractère « original » - ou non - du premier article (IA l’avait présenté ainsi et incitait à vérifier cette originalité) a bien entendu conduit à examiner la bibliographie existante, autre que les deux simples références (AMS 2010 et Science 2015) données par IA en conclusion de son article.
Ce type de travaux sur des orbites de Syracuse qui se rejoignent (to coalesce en anglais) a été l'apanage d'un professeur isolé, à La Barbade (Caraïbes), Charles C. Cadogan[13], publiant dans une revue dont il était lui-même l’éditeur, le Caribbean Journal of Mathematical and Computing Sciences. Ces travaux se déroulent entre 1984 et 2006 (voir une page de bibliographie de ce mathématicien, réf. 1 à 5 pour Syracuse)[14]. Ce mathématicien est décédé en 2015, et il est difficile d’avoir accès aux articles publiés dans cette revue.
En voici les résumés :
ainsi que :
Si nous insistons sur cet auteur, c’est parce que l’article de 1996 ci-dessus contient déjà le Théorème 1 et la Proposition 1 d’IA 2017 (p. 3). Un examen de ces articles, si nous pouvions y avoir accès (or, ils sont quasi introuvables) pourrait permettre de trouver d’autres convergences. Mais si nous insistons sur cet auteur, c’est aussi parce que, si IA a eu connaissance de ses articles (p. ex. à Stanford), il y a dans ce cas une troublante similitude entre son article et celui de cet auteur.
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Notre attention a aussi été attirée par un preprint bien rédigé récent (2019) dans le même esprit (coalescence d’orbites d’entiers suivant divers modulo), écrit par un étudiant d’une université américaine, Roy Burson (Undergraduate Student, California State University, Northridge) ; citant Cadogan dans une bibliographie assez fournie, il démontre lui aussi une conjecture d’équivalence, de type GGC[15]. Si nous le mentionnons, c’est parce que cela situe à notre sens l’article IA 2017 : pour ce qui n'est pas trivial, ce pourrait être un mémoire construit d'étudiant de licence, si c'était lisible.
Enfin, nous devons noter le caractère incongru des mentions que fait IA à ses « résultats » dans son ouvrage grand public de septembre 2018[16] (pages concernées) ; incompréhensible par la plupart de ses lecteurs, ne correspondant que de loin à la GGC, à énoncés redondants, cette présentation, en plus d’être peu fondée mathématiquement et d’une grande prétention[17], se fait de plus dans un contexte inepte de comparaison avec la biochimie.
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Les deux co-auteurs ci-dessous ont choisi de publier ce présent document sur internet car c’était à leurs yeux nécessaire – ni sur HAL, encore moins sur arXiv, mais sur le blog de vulgarisation scientifique de l’un d’entre nous (blog qui a fonctionné de 2006 à 2014). Certains lecteurs pourront trouver, nous l’espérons, intérêt à ce document et à la démarche la plus ouverte possible qu’il souhaite manifester.
A.Moatti et JJLP
7 février 2020
(nous tenons à remercier toutes les personnes qui ont participé sur Twitter à l’analyse de ce sujet – et notamment Antoine Bérut, Marc de Falco, Rémi Doris, Benoît Kloeckner…)
(en annexe ci-après, 3 p., analyse et simplification par JJLP de l’article IA 2017) (document complet PDF à télécharger)
[1] I. Aberkane, « On the Syracuse conjecture over the binary tree», 15 août 2017, non publié dans une revue, mis en ligne sur HAL.
[2] Qui préfère garder l’anonymat sur internet, mais pas spécifiquement en relation à ce sujet.
[3] Au sens général du terme, comme plus particulièrement au sens culinaire (« réduire une sauce »).
[4] JJLP a introduit les notions de nombre rose et nombre vert, non par ironie envers l’article d’IA qui appelle bleus les nombres impairs et rouges les nombres pairs, mais parce que ces notions rose et vert apportent réellement (à la différence de rouge et bleu) à la fluidité de son résumé ci-après. Ainsi, un nombre x est vert si et seulement si le chiffre qui précède le dernier 0 de son écriture en base 2 est égal à la parité du rang, le rang de N étant le nombre de chiffres 1 terminaux dans cette écriture. IA introduit quant à lui des définitions qui paraissent autant fantaisistes que superfétatoires : glacis, vanilla-related, banana, banana-split,…
[5] Nous ne prenons pas en considération ici les beaucoup plus nombreux tweets provocateurs où IA s’en prend à une communauté universitaire censément veule et ne prenant pas la peine de lui répondre. C’est pourtant ce que nous nous sommes résolus à faire ici, au risque d’alimenter cette moulinette.
[6] L’explication de la designation GGC est donnée par IA: « the author of this article established the Golden Gate conjecture at the Lange Special Collection Reading Room of the University of California, San Francisco, with a view of the Golden Gate Bridge, a name altogether fitting for the definition of a “bridge” connecting two “red numbers” as they were colored in his personal notes. » (IA 2017, p. 14).
[7] Comme dans les tentatives de démontrer le 5e postulat d’Euclide, y compris chez des « grands » mathématiciens (p. ex. Adrien Legendre, 1752-1833), en le remplaçant par un énoncé équivalent, mais supposément plus « simple ». Ou dans le problème de la quadrature du cercle.
[8] Voir par exemple Monks [2006, PDF], avec le résultat suivant lequel prouver Syracuse pour une suite arithmétique d’entiers positifs A + Bn (B non nul, aussi grand que l’on veut), équivaut à prouver Syracuse.
[9] Le caractère trivial ou non est détaillé ci-dessous suivant les différentes parties de l’article.
[10] I. Aberkane, « L’intersection des arbres 2-3-4-aires complets sur N forme un repère et construit une solution au problème de Syracuse », non publié dans une revue, daté du 12 janvier 2020, mis en ligne HAL le même jour.
[11] Un collègue a qualifié de « mystico-scientologique » l’article de 2020.
[12][12] IA indique que son article [2020b] serait supérieur à celui de Tao [2019], qui devient un simple cas particulier de ses résultats.
[13] Ce mathématicien est mort en 2015, à l’âge de 79 ans (hommage).
[14] Et plus spécifiquement les articles suivants de Cadogan, 2000-2006 : « The 3x+ 1 problem: towards a solution », Caribbean J. Math. Comput. Sci. 10 (2000), 11 p. ; « Trajectories in the 3x+1 problem”, J. of Combinatorial Mathematics and Combinatorial Computing, 44 (2003), 31 p.; “A Solution to the 3x+1 Problem”, Caribbean J. Math. Comp. Sci. 13 (2006), 11 p.
[15] Son résultat, clair et bien écrit, est le suivant : la conjecture « Pour tout entier k, les orbites de 2k+1 et 6k+5 convergent » est équivalente à Syracuse. Il est moins fort que celui d’IA, mais constitue un « résultat d’équivalence » assez comparable.
[16] I. Aberkane, L'Âge de la connaissance : Traité d'écologie positive, Paris, Robert Laffont, coll. « Réponses », septembre 2018, 374 p.
[17] « Je ne saurais trop insister sur le fait que ces théorèmes [NB : 7 énoncés précédents, en une à deux lignes chacun], c'est-à-dire ces preuves irréfutables, sont non seulement originales, donc jamais démontrées plus tôt, mais surtout qu’elles donneront l’impression très justifiée de sortir de nulle part [NB : nous nous sommes attachés à montrer le contraire dans la 2e partie du présent document], tout en réduisant considérablement la complexité du problème, ouvrant une faille majeure dans sa difficulté, contredisant ainsi l’affirmation d’in cessibilité “dans l’état actuel de nos connaissances”. Pourtant, sans aucune ambigüité, jamais je n’aurais pu produire de tels théorèmes sans m’inspirer de la structure des chaînes catalytiques en biochimie. Je peux ainsi affirmer qu’il y a une “biochimie du problème de Syracuse” […] » (IA, L’âge de la connaissance…, op. cit.)
Mon plus récent livre (février 2015) traite de l'Internet de la connaissance : Au Pays de Numérix, PUF, février 2015 (180 p., 14€ version papier, 11€ version électronique) (site éditeur)
4e de couverture
Championne incontestée de l’« exception culturelle », la France l’est aussi des postures prises contre Google ou Wikipédia. Elle leur oppose des projets complexes et coûteux : qu’est-il par exemple advenu du projet « Bibliothèque numérique européenne », censé contrer Google Livres, voire Google lui-même ? Sans verser dans la technophilie ou l’angélisme du tout-numérique, cet essai analyse les fondamentaux – quasi idéologiques, au pays de Numérix – de cette défiance à l’encontre de l’Internet de la connaissance. Ainsi donc, les Français, qui utilisent massivement Google ou Wikipédia, ne seraient-ils pas capables d’y exercer leur discernement ? Et que penser des positions de défense exacerbée des droits en tout genre – notamment ceux des données culturelles publiques (iconographie muséale, portraits officiels, émissions de radio) – qui en viennent à nuire à la diffusion numérique du savoir, avec un effet inverse à l’objectif de rayonnement culturel national ? N’est-il pas temps d’imaginer une autre forme d’exception culturelle, en faveur de la diffusion de la connaissance ?
J'aime bien les mois d'avril pour publier, mon premier livre était sorti en avril 2006, mon troisième en avril 2009. Ce mois-ci, avril 2014, sort mon sixième livre (hors deux livres dirigés chez Cassini). D'ailleurs avril est un anagramme de livra (livraison), et fait aussi penser à livre.
Je m'aperçois aussi que j'ai créé ce blog il y a exactement 8 ans, mon premier billet datant du 25 avril 2006. Et aujourd'hui nous sommes le 24 avril 2014, ce qui clôt un cycle de 8 ans. 230 billets, agrémentés de 340 images. Un livre issu du blog, les contenus reliés : au double sens où le livre est relié, et les sujets le sont entre eux – ce livre, Récréations mathéphysiques (Pommier 2011), aurait pu avoir plus de succès, je le recommande vivement.
Entretemps, en ces 8 années, j'ai fait de l'histoire des sciences : une thèse sur Coriolis (1792-1843), un site BibNum (MESR / CERIMES / SABIX), avec maintenant 125 textes, et cela continue – avec aussi deux ouvrages issus de ce site, là (2011) et là– site BibNum qu'il m'est arrivé de commenter ici dans ce blog. Avec aussi une douzaine de Bulletins de la SABIX, société savante que j'ai présidée sur cette période, avec la publication de deux bulletins/an (dont Poincaré, Lamé, Liouville), et dont nous avons mis les contenus en ligne sur revues.org.
En ces 8 années aussi, je me suis intéressé à l'alterscience, concept que j'ai tâché de définir, en dernière partie de mon second ouvrageEinstein, un siècle contre lui (2007), et beaucoup plus en détail dans mon précédent ouvrageAlterscience. Postures, dogmes, idéologies (2013). sur la base de mon séminaire 2008-2010 à l'EHESS. J'avais au départ conçu ma démarche comme liée à la vulgarisation, en défense de la science ; j'ai un peu évolué (pour un chercheur ce n'est pas illogique), je tâche d'analyser l'alterscience de manière plus neutre, plus évocatrice (mon blog sur Pour la Science, depuis octobre 2013).
Mais il est vrai que la vulgarisation m'a moins inspiré ces deux dernières années – le rythme du présent blog s'en est ressenti. Quelques commentaires désagréables ad hominem sur un billet spécifique d'août 2012, pourtant informatif, m'ont ému ; mais j'ai oublié cela, et d'ailleurs le billet correspondant a été sélectionné dans le livreLes meilleurs blogs de science en français, Agence Science-Presse (Montréal, 2013) !
Alors, peut-être est-il temps de clore ce blog, fruit d'un cycle entamé il y a 8 ans. Rien n'est éternel dans la vie, et sûrement pas un blog ! Il faut se renouveler, et puis je tiens d'autres blogs, et puis Twitter, et puis...
Les blogs : profusion sur le Web, du meilleur et du pire, y compris en sciences ; parfois trés répétitifs. Livres : comme les films, restent six semaines en librairie, quand ils arrivent jusque là. Revues de vulgarisation : comment renouveler les contenus, les angles d'attaque d'un sujet ? Twitter : si 10% de mes 1300 suiveurs lisent un de mes tweets, cela correspond à l'audience quotidienne du présent blog ; mais ce n'est pas le même public non plus. Alors, quel est le meilleur moyen de faire passer ses messages et ses idées, y compris de vulgarisation scientifique, dans la société d'hyper-information ? Je n'ai pas, ou n'ai plus, la réponse à cette question. En tout cas, je n'ai pas envie de faux semblants, "tenir un blog" alors que je ne l'alimente plus.
Avec ce cycle de 8 ans se clôt aussi ma présidence (statutairement limitée à deux mandats de 4 ans) de la SABIX, société savante que j'ai orientée vers le numérique. Je démissionne aussi du comité éditorial de la revue Tangente, que j'ai accompagné pendant 8 ans.
Du point de vue de la vulgarisation, je reste attaché à un style de vulgarisation mêlant les maths et la physique, sans craindre d'utiliser des formules simples, et en se rattachant le plus possible à la réalité, y compris en mathématiques. Avec l'importance d'une iconographie de qualité, parlante : ce que j'ai développé aussi sur BibNum, et dans mes activités de contributeur Wikipédia. Et puis des billets de blog courts– ça me paraît indispensable en vulgarisation.
Je reste disponible pour des interventions de vulgarisation en lycées – le réel est tout aussi gratifiant que le virtuel; je ne suis que peu sollicité dans les Promenades mathématiques en lycée de la SMF, une fois par an au grand maximum – il y a une réel cloisonnement entre enseignement traditionnel et vulgarisation, en tout cas vu de ma position.
J'ai apprécié de faire partie (depuis 2007) de la communauté de blogs du Café des sciences : tous blogueurs plus jeunes que moi, enthousiastes, dynamiques, de tous horizons (journalistes, ingénieurs, chercheurs, France, Suisse,...). Des projets, de bonnes réunions, un WE scientifique au CERN, et puis... du trafic sur le blog !
J'en profite aussi pour remercier mes lecteurs attachés à ce blog (même si j'ai eu peu de retours là-dessus ; ça manque aussi, les petits signes, quand on blogue ! Je ne sais même pas si mes lecteurs sont des professeurs, des élèves, ou s'ils sont hors du milieu Education nationale). Moi-même suis évidemment attaché à mon blog : mais les blogueurs doivent-ils être identifiés ad vitam à leur blog ? N'y a-t-il pas là aussi une forme de posture, parfois : "je suis tel professeur ou tel chercheur (en sciences ou dans d'autres matières), et mon blog fait autorité, attention !".
Alors, 8 ans, ça suffit ? En tout cas, ce 24 avril, oui ! (24/4/2014, c'est un joli nombre, ça) !
Mais, "tant qu'il y a de la vie, &c.": peut-être y aura-t-il une nouvelle formule pour revivifier les contenus ici présents ? J'y réfléchis. Se renouveler. Renouveler ses formats et ses canaux de diffusion. La suite, peut-être, dans quelque temps ("Les Indispensables, le retour").
Ce billet est bigrement trop long, mais j'allais oublier, au fait : mon livre, sorti le 10 avril– c'était l'objet de ce dernier billet ! Le Mystère Coriolis, CNRS Editions, 240 pages illustrées.
(Sommaire du livre, PDF sur ce blog) (Avant-Propos en ligne sur Actualitté)
J'aurais pu appeler ce billet "Inversion de la courbe de la durée du jour", mais, comme l'a rappelé Etienne Klein sur France-Culture, cette notion d'inversion de courbe (utilisée pour le chômage) est aussi erronée qu'incompréhensible.
Mais restons dans l’astronomie, si vous le voulez bien. On le sait, la durée du jour dans nos régions augmente entre le solstice d’hiver (21 décembre) et celui d’été (21 juin). Je me fonde sur les tables du site ‘Calendrier solaire’ (désolé ce site a des pubs, mais il est pratique) : elle passe de 8h7mn à 16h2mn (un quasi doublement !).
Mais ce qui nous intéresse ici est la variabilité de cette variabilité : je me suis rappelé cela en remarquant que depuis début février, on remarque beaucoup plus que le Soleil se lève de plus en plus tôt, beaucoup plus qu’en janvier où on ne le remarquait guère. J’ai fait les calculs pour vous,
Période
Allongement en minutes
Nb. de jours
Allongement moyen quotidien
22 décembre (2013) — 21 janvier
44
31
1'25''
22 janvier — 21 février
97
31
3'08''
22 février — 21 mars
101
28
3'36''
22 mars — 21 avril
113
31
3'39''
22 avril — 21 mai
87
30
2'54''
22 mai — 21 juin (2014)
38
31
1'13''
Total 480 = 8h
(on retrouve les 8h de ci-dessus)
La durée du jour augmente lentement après le solstice d’hiver, et diminue lentement avant le solstice d’été. Autrement dit, elle varie lentement autour des solstices : car la valeur d’une fonction varie peu au voisinage de ses extrema. On remarquera d’ailleurs qu’à l’équinoxe (le 21 mars), qui n’est pas un extremum, c’est là que la variation est la plus forte (seule fois où apparaît +5mn, le 20 mars).
Et tout ceci est connu depuis des lustres et prédictible pour des lustres. L’astronomie, ce n’est pas l’économie ou la politique : « inverser une courbe », c’est fastoche !
[pour ceux qui veulent aller plus loin : à l'équinoxe, c'est la variabilité qui est à son maximum — la dérivée seconde est nulle. C'est un point d'inflexion : la durée du jour est toujours croissante, mais en 'accélérant' (variabilité croissante) entre solstice d'hiver et équinoxe, et en 'décélérant' entre équinoxe et solstice d'été]
Ajoût du 23 septembre 2024
C'est la 1e fois que je fais un ajout sur un billet de blog depuis 2018, mais un lecteur assidu m'a demandé sur les réseaux sociaux : "est-ce vraiment une sinusoïde ?" La réponse est non, bien sûr : c'est une fonction de type sinusoïdal.
Du coup j'ai eu l'idée de demander à ChatGPT (c'est à la mode), et la durée du jour est un arcosinus d'un produit de deux tangentes. Voici les écrans. Le point 1 est facile à comprendre (déclinaison en fonction de 23,44° inclinaison de l'axe des pôles par rapport au plan de rotation). Le point 3 aussi (le Soleil fait un tour en 24h, donc 15° par heure). Le point 2 (non démontré) est ce produit de tangentes, fonction de la déclinaison ce jour-là et bien sûr de la latitude.
Nous avons vu avec Berger, dans notre précédent billet, pourquoi il n’y a que 5 polyèdres réguliers (convexes) – nous nous sommes pour cela appuyés sur la relation d’Euler S – A + F = 2 (nombre de sommets S, d’arêtes A, de faces F), valable pour tout polyèdre convexe. Toujours avec Berger, voyons une extraordinaire démonstration de cette relation, démonstration qu’il appelle affine.
On prend n’importe quel polyèdre convexe, et on imagine le couper par un plan qu’on va progressivement faire descendre du sommet supérieur du polyèdre (en le mettant dans une position donnée, peu importe) au sommet inférieur. Le dessin ci-dessous parlera mieux que moi (j’adore ces dessins manuscrits de Berger, nous en avions déjà utilisé un là).
On peut prendre n’importe quelle direction de plan, à une condition : que ces plans parallèles ne contiennent jamais plus d’un sommet du polyèdre (on se convaincra aisément que c’est une condition facilement réalisable). On va alors faire le compte en faisant descendre le plan. En haut, quand le plan touche le sommet sans être entré dans le polyèdre, la somme (on appelle ainsi S – A + F, par simplification) vaut 1 (S=1, A=F=0). En entrant depuis le sommet du haut dans le polyèdre, on capte autant de faces que d’arêtes (du sommet partent h arêtes, et le sommet appartient à h faces – comme déjà écrit, pour s’en convaincre, aplatir le voisinage du sommet sur un plan, et constater qu’il y a dans ce voisinage autant d’arêtes que de faces, i.e. autant d’arbres que d’intervalles) : donc S reste égal à 1. Continuons à faire descendre notre plan de coupe, et l’on rencontre un premier sommet dans cette descente (à chaque fois, l’on n’en rencontre qu’un puisque c’est la condition imposée au plan de coupe). Notre somme s’incrémente de +1 (le sommet), mais regardons ce qui se passe au niveau F et A. Je fais un dessin aplatissant le sommet, moins joli que celui de Berger.
À chaque traversée de sommet, S gagne 1, (A-F) gagne 1, S-A+F reste stable.
Le plan et son sens de descente sont en rouge. Il va « capter », dans ce cas, h’ nouvelles arêtes (ici 3), et h’ – 1 nouvelle faces (ici 2). Sur un sommet traversé, le nombre d’arbres (arêtes) n’est pas égal au nombre d’intervalles (faces), car les nouvelles arêtes « encadrent » les nouvelles faces. Ce qui fait qu’au passage d’un sommet qui n’est ni le premier ni le dernier, on a :
Avant
Après
sommets
S
S + 1
arêtes
A
A + h’
faces
F
F + h’ - 1
Somme d’Euler
transitoire
S – A + F = 1
(comme au départ)
(S +1) – (A+ h’) + (F + h’ – 1)= S – A + F
(inchangée)
Là, j'ai un peu trop décortiqué pour convaincre (ce qui m'oblige à introduire une variable h'). Une manière plus concise : pendant la “traversée” du polyèdre par le plan de coupe, la somme reste égale à 1, puisqu’à chaque sommet S s’incrémente de 1, mais (A-F) aussi, ce qui fait que S – A + F reste constant, égal à sa valeur de départ, 1. Jusqu’à récupérer le dernier sommet, en bas, où il n’y a plus faces et arêtes en dessous, et la somme s’incrémente de 1 (le dernier sommet), pour arriver à 2. Comme l’écrit Berger sur son dessin, et c'est bien connu, 1 + 1 = 2. CQFD.
1. Pour aprofondir, on s'aperçoit avec Wikipédia que Descartes avait déjà trouvé dans un manuscrit inédit (écrit en 1680) la relation qu'Euler formalise en 1752, ce qui fait qu'en France (surtout sur Wikipédia, car pour ma part j'ai toujours entendu 'Relation d'Euler'), on appelle cela Théorème de Descartes-Euler.
2. Plus intéressant, on trouvera aussi sur l'extrait Wikipédia ci-dessus une extraordinaire généralisation aux dimensions supérieures par Poincaré 1893 :
Retenons que S – A + F vaut alternativement 0 (dans toutes les dimensions paires, à commencer par 2, dans le plan avec des polygones) ou 2 (dans toutes les dimensions impaires, à commencer par 3, dans notre espace avec des polyèdres).
Dans le plan, en dimension 2, il y a une infinité de polygones réguliers : triangle équilatéral, carré, pentagone, hexagone, n-gone (voir dans mon premier ouvrage, p.68-69, l’approximation par Archimède de pi au moyen du périmètre des polygones réguliers inscrits dans le cercle). Or, en dimension 3, dans l’espace, n’existent que cinq polyèdres réguliers convexes (ou solides de Platon — encore un Grec). Pourquoi ? Comment ? De qui, de quoi ? Pour la géométrie, une référence, un guide de voyage : le Berger (Géométrie vivante, Cassini, 2010)— comme une étoile qui nous… guide. Style direct et sans bavures. On en avait déjà eu deux échantillons en 2011 (polygones étoilés et enjoliveurs) et 2009 (cercles du tore) dans ce blog, accompagnant un des textes BibNum sur lequel je me suis le plus amusé à travailler.
Le mage Berger utilise la relation d’Euler, bien connue dès la maternelle (je plaisante à peine : on pourrait la faire toucher du doigt aux enfants avec les cubes de leurs jeux de construction, ou avec les ballons de foot) : S – A + F = 2, où S est le nombre de sommets, A le nombre d’arêtes, F le nombre de faces. Il l’écrit subtilement f0 – f1 + f2 = 2 (où f0 est le nombre d’entités sans dimension, des points, les sommets, S ; f1 est le nombre d’entités à une dimension, les arêtes, A ; etc.). Gardons la notation classique, et introduisons h le nombre d’arêtes partant de chaque sommet, et k le nombre de sommets par face.
Pour ceux qui veulent toucher du doigt, ou qui veulent des chiffres concrets, voici le tableau pour les 5 polyèdres réguliers convexes :
(de haut en bas dans l'ordre du tableau, qui est le nombre croissant de faces)
Un sommet appartient à h faces (pour s’en convaincre, aplatir le voisinage d’un sommet sur un plan : le nombre d’arêtes partant du sommet, h, est égal au nombre de faces qui sont entre ces arêtes). Le nombre total de sommets, S, est donc égal à Fk (nombre de faces × nombre de sommets par face) divisé par h, puisqu’un sommet appartient à h faces (vérifier avec le tableau). Le nombre total d’arêtes, A, est égal à Sh (nombre de sommets × nombre d’arêtes partant de chaque sommet), divisé par 2, puisqu’une arête relie deux sommets (« appartient » à deux sommets).
S = Fk/h
A = Sh/2 = Fk/2
Reprenons la relation d’Euler, S – A + F = 2, et réinjectons ces valeurs.
Fk/h– Fk/2 + F = 2
Fk+ Fh = 2h + Fkh/2 > Fkh/2
k + h > kh/2
1/h + 1/k > 1/2
Or, si l’on réfléchit, il y a peu de couples d’entiers {h,k} (strictement supérieurs à 2) vérifiant cette propriété : {3,3} (tétraèdre), {3,4} (cube), {4,3} (octaèdre), {3,5} (dodécaèdre), {5,3} (icosaèdre). À partir de 3,6, on a 1/h + 1/k ≤ 1/2, donc la relation ci-dessus n’est pas vérifiée : le polyèdre n’existe pas.
Terminons avec Berger et sa magnifique phrase, une fois démontré qu'il n'existe que cinq polyèdres au plus : "L'existence sera vue plus bas"! Bon, pour l'existence, en ce qui nous concerne, nous nous contenterons des figures ci-dessus.
Faisons en cette nouvelle année un bilan d’activité de ce blog, ouvert il y a bientôt huit ans, en 2006 année de mon premier ouvrage. 457 000 visiteurs sur 92 mois (c’est pas mal d’inscrire son action dans la durée, 227 articles au compteur), ça fait 165 visiteurs/j. Il y a eu des années plus fastes (2008-2009, avec des moyennes de 250/j), mais, bon, on ne se plaint pas. On est à présent, début 2014, sur cette fréquentation moyenne de 165/j, et il faut remercier Twitter (où je suis actif @AlexandreMoatti) et Café des sciences (dont je suis membre depuis 2007) pour les lecteurs qu’ils amènent.
En 2012, j’ai fait une dizaine de billets, ce qui est peu. Il faut dire que j’ai publié un ouvrage début 2013, Alterscience, qui a fait l’objet d’un certain nombre de recensions. J’ai aussi ouvert un blogAlterscience sur le site du magazine Pour la Science à leur demande. Pour moi, l’analyse des idéologies utilisant la science est indissociable de la vulgarisation scientifique (comme le disait le regretté Martin Gardner).
Martin Gardner (1914-2010) : la tête du type qui réfléchit
(image WikiCommons, auteur Konrad Jacobs, Erlangen)
Ma dizaine de billets 2013 sur le présent blog : avant les vacances d’été un billet de mécanique (patinage), un billet d’arithmétique (nombres premiers jumeaux), une heuristique de probabilités (rencontres improbables), un billet de géométrie (Bibracte dans le Morvan). Et puis à partir de la rentrée je me suis lancé dans d’autres domaines, moins « sciences exactes », plus spéculatifs : technologie (adieu et merci Nokia !), écologie (aménagements ferroviaires), heuristique physique (temps caractéristique) ou mathématique (nombre d’abonnés Twitter) des réseaux sociaux. Je continuerai à la fois en sciences exactes, et moins exactes.
On refera des maths, dès demain. De la géométrie. C’est programmé. Le présent billet n’était qu’un teasing. En attendant révisez votre relation d’Euler (sommets, faces, arêtes).
J’avais déjà commis un billet de blog à propos des réseaux sociaux, où je faisais une hypothèse hasardeuse sur leur temps caractéristique, peut-être vraie, peut-être fausse – en tout cas correspondant à mon intuition. Je continue sur cette voie heuristique, en essyant de trouver ce qui pourrait être quantifiable.
Il y a longtemps que je m’interroge sur l’existence d’une relation (allez, carrément : une fonction ?) entre le nombre d’abonnés NA que l’on a sur Twitter, et le nombre de tweets NT que l’on a faits. Sachant que ce sont sans doutes les dérivées dans le temps de ces deux paramètres qui interviennent avant tout : ∂NA/∂t (l’augmentation de votre nombre d’abonnés) semble très sensible à ∂NT/∂t (la fréquence de vos tweets). Il y a bien évidemment d’autres facteurs, comme la ‘célébrité’ : mais j’ai la vague intuition que ce pourrait n’être qu’un facteur proportionnel d’amplification, K, qui ne change pas autrement la structure de la relation cherchée. De toute façon, l’on serait bien incapable de quantifier cette ‘célébrité’, d’autant que celle-ci peut être extrinsèque à Twitter (un journaliste, un homme/femme politique auront NA grand), mais, plus intéressant : elle peut être intrinsèque : telle personne devient une célébrité grâce à Twitter. Dans ce dernier cas, on pourrait imaginer un « effet boule de neige » quantifiable (une exponentielle ?).
Un autre paramètre quantifiable intervient : le nombre de retweets NR que vous avez sur vos tweets. C’est, en théorie, le seul moyen que vous avez pour que NA augmente (je pars du principe d’un fonctionnement dynamique et non statique : il est rare que quelqu’un vienne spontanément sur votre fil Tweeter et décide de s’y abonner – il y est incité par un retweet ; sauf justement cas de ‘notoriété’ extrinsèque).
En incise, une autre question que je me pose : quand je fais un tweet, combien parmi mes NA le verront-ils ? (ça dépend bien sûr de l’heure de la journée). Mais donnons un chiffre : 5, 15, 25% grand maximum ?
Retour à la question de départ (relation NA/NT mais surtout leurs dérivées – car c’est plus une communauté de flux que de stocks). Je n’ai pas évoqué le nombre d’abonnements NAb que vous avez, et s’il intervient. En fait, c’est surtout le NAb qu’a chacun de vos abonnés qui compte – à cet égard on pourrait parler de facteurs secondaires (non qu’ils soient moins importants que les facteurs primaires décrits ci-dessus, mais parce qu’ils concernent vos abonnés et non vous – un paramètre pour chacun de vos abonnés – ce qui conduit à une matrice). Car plus ils ont d’abonnements, moins ils voient vos tweets, et moins ils vous retweetent (c'est purement probabiliste, indépendamment de l'intérêt de vos tweets !). Et plus ils ont d’abonnés, plus les chances que ceux-ci s’abonnent à vous lors des retweets est grande. Pour votre nombre d’abonnés (NA), cela joue comme l’algorithme matriciel du page ranking Google, déjà évoqué de manière simpl(ist)e dans ce blog : 1) [Il est intéressant d’être référencé par des pages qui sont-elles mêmes bien classées]>>> Il est intéressant d’être suivi par des personnes qui ont beaucoup d’abonnés. 2) [plus la page i possède de liens vers d’autres pages, plus l’intérêt qu’elle porte à la page j est dilué] >>> plus vos abonnés NA ont eux-mêmes d’abonnements NAb, moins ils vous suivent et vous retweetent.
Il faudrait aussi considérer « l’effet local », c'est-à-dire le fonctionnement en îlots, communautés : certains groupes se répondent et se retweetent beaucoup plus entre eux : dans leur ‘matrice globale’, ils auraient des sous-matrices très actives, permettant d’augmenter plus vite NA, mais avec effet de saturation (une fois qu’on a râtissé dans sa communauté).
Je l’ai dit, Twitter est plus une affaire de flux que de stocks. Je pense que NA baisse peu même si la fréquence ∂NT/∂t chute. C’est ce qu’on appelle une élasticité à la baisse faible. Allez voir @jeffpulver : il a eu tweeté, mais il s’est calmé – il reste néanmoins avec ses 498 000 abonnés (mais il les avait déjà en juin – il n’atteint pas encore les 500 000 : ∂NT/∂t et ∂NA/∂t ont chuté, mais NA pas tellement, sans augmenter toutefois).
Et puis heureusement, il y a toujours des singularités (mathématiques !) dans toute fonction. Je cherchais une image pour ce billet, voilà une belle singularité qui défie toute recherche de relation NA vs. NT (notre problématique initiale), et en plus cette singularité est dans le domaine des maths:
(0 tweet, 0 abonnement, 198 abonnés / merci à @enroweb de m’avoir signalé ce compte singulier, dont NA peut augmenter sans que les autres chiffres ne décollent) (qu'Images des maths ne m'en veuille pas de ce ciln d'oeil , ou qu'ils deviennent actifs sur Twitter !)
Plus que le singulier, le totalement absurde (c'est pas mal aussi d'avoir cela en maths): pendant un moment, j'ai eu plus d'abonnés que de tweets (NA > NT); IL y a eu un moment, en juin, où NA = NT, moment fugace. Aucune signification.
Voilà, ce sont ici quelques pistes de réflexion, pour moi comme pour mon lecteur. Il existe sans doute des articles scientifiques sur ce sujet-là (spécifiquement Twitter). N’hésitez pas à me les faire connaître. Mais j’ai préféré lancer ces quelques pistes en suivant mon intuition, en espérant qu’elles vous seront utiles.
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Lecture et analyse des articles d’Idriss Aberkane sur la conjecture de Syracuse Nous voulions analyser l’article de 2017 d’Idriss Aberkane sur la conjecture de Collatz-Syracuse [1] . L’un de nous, JJLP (Jojo Le Poisson) [2] , par ailleurs mathématicien,...
Mon plus récent livre (février 2015) traite de l'Internet de la connaissance : Au Pays de Numérix, PUF, février 2015 (180 p., 14€ version papier, 11€ version électronique) (site éditeur) 4e de couverture Championne incontestée de l’« exception culturelle...
J'aime bien les mois d'avril pour publier, mon premier livre était sorti en avril 2006, mon troisième en avril 2009. Ce mois-ci, avril 2014, sort mon sixième livre (hors deux livres dirigés chez Cassini). D'ailleurs avril est un anagramme de livra (livraison),...
Mon dernier ouvrage est sorti le 14 octobre 2010 : Récréations mathéphysiques (éditions Le Pommier) (détails sur ce blog)
Lettre Du Blog
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Einstein, un siècle contre lui
J'ai aussi un thème de recherche, l'alterscience, faisant l'objet d'un cours que j'ai professé à l'EHESS en
2008-2009 et 2009-2010. Il était en
partie fondé sur mon second livre, "Einstein, un siècle contre lui", Odile Jacob, octobre 2007, livre d'histoire des sciences (voir billet sur ce blog, et notamment ses savoureux commentaires).